pallier à un biais cognitif de futurologue
En matière de prévision, l’attente concerne principalement l’expression d’évolutions sociales radicales. Or, la société va normalement réagir à ces déséquilibres de façon à les compenser en générant un ensemble de mesures d’adaptation, comme le font tous les êtres vivants qui assurent leur survie face aux évolutions de leur milieu.
Selon Walter Bradford Cannon (voir ci-après)
Les réactions physiologiques coordonnées qui maintiennent la plupart des équilibres dynamiques du corps sont si complexes et si particulières aux organismes vivants qu’il a été suggéré qu’une désignation particulière soit employée pour ces réactions : celle d’homéostasie.
La non-prise en compte de ce principe s’assimile à un biais cognitif de futurologue, d’autant plus récurrent:
• que ce dernier “tombe fréquemment amoureux“ des innovations dites de “rupture“ qu’il aura imaginées et qu’il supportera mal de voir s’abâtardir dans un champ de forces hétéroclite
• qu’il n’a que des raisons de privilégier les scénarios radicaux («pourquoi les futurologues ont-ils besoin du totalitarisme?»
homéostasie et cybernétique
Walter Bradford Cannon (1871-1945)
…est un physiologiste américain, professeur à la Harvard Medical School. C’est un des précurseurs des rayons X. Il a entre autres développé le principe de fight-or-flight à l’origine de celui de double contrainte, et, après Claude Bernard, le concept d’homéostasie notamment dans The Wisdom of the Body («La sagesse du corps»1932) …/… Ce concept d’homéostasie, l’un des plus importants en biologie et en physiologie, sera une des clés du développement du mouvement cybernétique.
La cybernétique
[dropcap type= »circle » color= »#COLOR_CODE » background= »#COLOR_CODE »]“[/dropcap]… est une science des systèmes autorégulés, qui ne s’intéresse pas tant aux composantes qu’à leurs interactions, et où est pris en compte avant tout leur comportement global. C’est une modélisation de la relation entre les éléments d’un système, par l’étude de l’information et des principes d’interaction.
homéostasie et “stress social“
Le vivant se rééquilibre de façon progressive et diversifiée, mais au-delà de certaines limites d’autres mécanismes se mettent en place dont le stress (source)
Cannon conçoit donc l’homéostasie comme ayant certaines limites dont la transgression provoque un stress, défini par Cannon comme un stimulus endogène ou exogène provenant du déséquilibre trop important de l’homéostasie …/… Le stress pour Cannon est donc le complément à l’homéostasie qui permet de minimiser les dégâts déjà engendrés à l’organisme. C’est une réaction d’urgence à court terme qui favorise la fuite ou la lutte, c’est-à-dire l’évitement de la situation pathogène. Et en ce sens, le stress est fondamental à l’adaptation d’un organisme.
Ce mécanisme de “comportement aux limites“ illustré par le stress pourrait trouver des correspondances dans l’évolution des sociétés.
homéostasie, percolation, légitimité
Quelles relations l’idée d’homéostasie entretient-elle avec les deux précédents concepts que nous avons isolés pour l’approche du futur?
La percolation («la percolation: une base théorique pour analyser l’évolution»)
Une progression de type virale comme celle des nouvelles idées, des nouvelles pratiques, de l’adoption de nouvelles technologies… qui appelle des rééquilibrages graduels et qui simplifiera ainsi le franchissement du seuil de percolation, celui où la nouvelle pratique se généralise et où l’homéostasie du système est la plus sollicitée. En modélisant la pénétration des déséquilibres, la percolation renseigne sur les possibles de leurs contre-forces.
la légitimité («le concept de légitimité: une clé pour l’approche du futur»)
Les légitimités sont évolutives. Celles d’hier ne sont plus celles d’aujourd’hui qui ne seront plus celles de demain, ce qui va conditionner la nature des groupes, des usages et des innovations du futur…/… Face aux possibles économiques ou technologiques, la légitimité apparaît donc comme un mode d’expression des «possibles sociaux.
Avec la transformation des légitimités, nous disposons effectivement d’un principe homéostatique qui tend à rétablir l’équilibre du système social perturbé par ses innovations.
homéostasie et idéologies
L’émergence de nouvelles idéologies à l’oeuvre dans l’évolution des légitimités peut être considérée comme participant à cette recherche de nouveaux équilibres. Nous l’avons déjà envisagé avec:
• l’évolution de la pensée environnementale (l’environnement: des métamorphoses à l’avenir d’une pensée) dont l’histoire est celle d’une adaptation permanente de nos croyances
• l’émergence du collaboratif, envisagé dans le billet «coworking: un vent de convivialité… très suspect» et plus spécialement à propos du double conditionnement
en guise de conclusion provisoire
Par ailleurs, les systèmes à l’oeuvre dans le fonctionnement d’une société sont multiples et une réaction en “mode social“ peut à son tour générer des déséquilibres, voire de nouvelles opportunités dans l’économique («l’économie collaborative: le triple piège d’une utopie») … etc.
Dans l’idéal, notre approche du futur devrait donc se fonder sur un système d’homéostasies et sur ses possibilités d’équilibres dynamiques… dans l’idéal.
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