qu’est-ce qui caractérise une ville nouvelle?
- La pensée de projet se veut “non contrainte”… notamment par un “existant”. C’est ce qui justifie l’approche par “la feuille blanche”.
- Cette exigence de liberté est rendue nécessaire par l’objectif de créer un urbain différent. C’est là que va se nicher un ferment d’utopie… ou ce qui pourrait en tenir lieu.
de la simplification aux invariants de “l’utopie urbaine”
La simplification des représentations
l’esquisse
Nombre de villes en sont restées au stade du croquis d’architecte. On pourrait en déduire qu’une ville ne nait véritablement que plus tard. Or, à beaucoup d’égards, c’est l’inverse. Car le premier schéma provient, lui aussi, de quelque chose. Un faisceau de déterminants n’attendent que la feuille blanche pour se révéler.
- La forme affiche une identité. Elle fonctionne comme un logo
- La référence à une forme connue est perçue comme un gage d’authenticité et d’intemporalité
- Une forme identifiable apparait globalement dénaturée même par une petite altération… ce qui décourage celle-ci
- Cette représentation est dénuée d’échelle. Elle est ainsi peu sensible aux variations d’objectifs de population.
- Une forme identifiable est très utile pour assurer la relation entre un discours et une représentation, exigence que l’on retrouve dans l’art… ainsi que finalement dans toute pensée de projet.
Cependant, donner une forme à une ville c’est raisonner sur une ville terminée. Ce qui amène à gommer tout ce qui se passe entre le “rien initial” et le “tout final”, ainsi que tout ce qui se passera… “après ce final”. La ville nouvelle correspond à une pensée du futur semblable à celle de la science-fiction: lire aujourd’hui une représentation de l’espace dans lequel on sera immergé après-demain… sans avant et sans après.
le système de circulation
Les circulations internes s’inscriront dans un maillage délimitant des zones. Celles-ci seront affectées à des fonctions urbaines (logements, bureaux, équipements…) et généralement modélisées (densité, hauteur…) selon des configurations répétitives.
La “répétition à l’identique” est une caractéristique fondamentale de toute “utopie”. Elle permet de se satisfaire d’un argumentaire global en faisant l’impasse sur l’approche du vécu.
l’expression d’un pouvoir
La troisième dimension
La hauteur est curieusement un des supports exploité par l’utopie urbaine (voir ici), alimenté notamment par des discours du type de ceux de Le Corbusier. Il faut dire que la ville s’en trouve ainsi réduite à un problème d’architecture… donc encore une fois simplifiée.
La représentation en trois dimensions est en voie de devenir exclusive, stimulée par les outils nouveaux désormais disponibles. L’époque de la communication par des plans est sans doute révolue.
Les espaces verts
- Combien de temps, en moyenne, passe l’habitant d’une ville existante dans les espaces verts… en dehors des assistantes maternelles et des SDF… qui ne demandent en outre que des espaces de petite taille?
- Une ville, par définition, est un espace construit. L’espace vert constitue donc la plus intemporelle des insuffisances… donc le plus inusable des arguments pour un nouvel urbain… d’autant qu’à l’inverse de beaucoup d’autres, il est “représentable”. Il est même un “embellisseur de plans”.
Ce qui introduit le chapitre suivant dans la mesure où l’extrapolation de l’espace vert en “ville nature” est largement abusive: des immeubles de grande hauteur végétalisés sont avant tout de gigantesques pots de fleurs… qu’il faut arroser régulièrement… alors que l’eau va manquer. D’où une ville que l’on peut prévoir “très peu durable”, au moins sous cette forme .
la simplification des concepts
- les inégalités… incompatibles avec l’utopie
- les incertitudes liées au caractère organique de son développement, notamment à partir de ses activités… ce qui est incompatible avec les intentions et les schémas figés qui fondent son identité.
- la complexité des processus incompatible avec les exigences de simplification
En outre, sa population effective ne va dépendre que de ces données… alors qu’on l’aura définie en amont de façon… plus ou moins arbitraire.
Sur le plan du contenu, le projet de ville nouvelle se nourrit des problèmes du moment… soit en contradiction avec la dimension d’intemporalité dont devrait se parer l’urbain”. Hier les projets étaient alimentés par les nouveaux besoins de la circulation automobile, aujourd’hui ils le sont par l’idée de supprimer celle-ci. Chacune de ces vérités se veut, à son époque, indiscutable.
Or “l’indiscutable” est particulièrement recherché, car c’est un consensus qui devra se substituer à une approche démocratique… impossible… comme dans toute utopie (voir). L’ambition qui fonde la création d’une ville ex nihilo suppose l’existence d’un pouvoir fort susceptible de l’assumer autant par l’expression et le suivi d’une volonté que par la mobilisation de moyens, le tout pour obtenir un nouvel urbain… “rapidement”. Une ville nouvelle est liée à une impatience.
en guise de conclusion provisoire
Nous allons envisager dans le prochain billet le projet de ville nouvelle de Neom et ses différents devenirs possibles en fonction d’exemples de dérives qui ont affecté des projets du même type ailleurs.
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