À l’articulation du besoin, de la propriété, du risque et du pouvoir, le stockage a de tout temps déterminé les échanges et les pratiques sociales. C’est par lui que les chasseurs-cueilleurs sont devenus sédentaires. Des richesses, des inégalités, des conflits en ont découlé jusqu’à ses déclinaisons modernes où nous le retrouvons derrière les notions de “marché” et de “monopole”. Nous associons ainsi assez spontanément diverses déclinaisons du stockage aux grands problèmes de notre époque.
le stockage et ses métamorphoses
Tout est en voie d’être pensé comme objet possible d’un stockage. Tout stockage est raisonné comme source potentielle d’un pouvoir, ce qui l’amène – naturellement oserait-on dire – à se vouloir international et monopoliste.
Quelques remarques préalables:
- Les grands stockages internationaux concernent de façon croissante des produits non périssables. Ils échappent ainsi aux vieux principes économiques d’autorégulation des prix qui leur étaient associés.
- Les stockages d’origines naturelles – dits “ressources” – construisent de façon croissante leur valeur à partir de technologies de plus en plus élaborées et spécialisées, dont les exigences en matières premières sont de plus en plus spécifiques. (terres rares, silicium de qualité électronique …)… ce qui amène mécaniquement à une raréfaction des ressources “effectivement demandées” et par là d’autant plus faciles à monopoliser. La Chine produit ainsi les deux tiers du silicium consommé dans le monde et 85% des terres rares.
(*) Bien qu’il existe de nombreux gisements de terres rares dans le monde, ils ne sont pas (encore) exploités, ce qui explique la mainmise de la Chine sur ces ressources. Or, il faut environ 25 ans entre le début d’un projet de mine et le début de son exploitation.
- Les monopoles sont alimentés par leurs futures victimes en ce sens que celles-ci leur délèguent très généreusement les consommations de ressources et les productions de nuisances environnementales associées aux phases préalables des processus, comme dans le cas des terres rares ou du silicium.
(*) Produire du silicium de qualité électronique consomme 160 fois plus d’énergie que du silicium de qualité métallique
implications possibles de cette tendance
(*) Les difficultés pour s’approvisionner en lithium, nickel, manganèse ou cobalt pourraient ralentir le passage à la voiture électrique, rendre les véhicules plus chers et menacer les marges bénéficiaires des entreprises …/… En un an, le prix du carbonate de lithium, qui provient principalement d’Australie et du Chili, a plus que doublé …/… et pour le cobalt, dont les plus grands gisements se trouvent en République démocratique du Congo, une augmentation du prix est également attendue.
Ce qui pourrait rendre plausible un glissement mondial très progressif – et ainsi peu lisible dans un premier temps – vers des produits de substitution et une valorisation de technologies moins optimisées, s’appuyant sur des ressources moins rares et une attitude plus distanciée vis-à-vis des approches classiques de la “performance”. Ce qu’il advint du vol commercial supersonique (mentionné ci-dessus) en constitue un bon exemple.
un rêve d’écologiste?… peut-être…
Autour du stockage pourraient bien être renvoyées dos à dos les grandes pensées du futur actuelles … pensée technophile des uns et pensée technophobe des autres au profit de … quelque chose de nouveau, qui émergerait sans doute… “tout seul”… dans les failles du paradigme actuel… à la manière des révolutions scientifiques.
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