Ces gadgets qui nous annoncent un autre futur

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Toute innovation est un gadget… “au début (voir lien).

Ce statut évolue rapidement si elle s’inscrit dans une tendance lourde. Or, sous des dehors innocents, c’est “au carrefour de plusieurs tendances lourdes“ que se situe la montre connectée.


La montre connectée: au carrefour de 3 tendances


Avec le micro-ordinateur est née l’informatique personnelle “statique“. Devenue “connectée, puis “mobile“, avec les ordinateurs portables… elle a abouti à l’actuel smartphone, soit une tendance apparemment claire derrière laquelle apparait cependant un faisceau de “3“ tendances:

  • La simplification de l’informatique personnelle
  • La recomposition du rapport hardware-software
  • L’approche d’un seuil de miniaturisation

Avec des conséquences potentiellement spectaculaires qui pourraient signifier la fin d’une “ère“ technologique, précisément celle sur laquelle nous avons pris l’habitude de fonder notre vision du futur.


L’hyper-simplification de l’informatique personnelle


L’informatique personnelle s’est longtemps identifiée à Word, Excel… aux metteurs en pages, à Photoshop, Illustrator et consorts. Chacun travaillait à “accéder“ à l’informatique. Ces logiciels se chargeaient régulièrement de nouvelles fonctions les rendant de plus en plus complexes. Ils relèvent aujourd’hui d’une pratique professionnelle, alors que le grand public s’est replié sur des logiciels plus sommaires (Google Docs) et un univers de micro-applications, d’un prix réduit, téléchargeables et disponibles sur smartphone. Le monde du logiciel est devenu dual. Il y a de moins en moins de logiciels… « moyennement complexes ». Ils sont très simples… ou professionnels.

Ce modèle semble devoir rendre compte également de l’évolution du hardware.


La recomposition du rapport hardware-software


 Parallèlement à cette “atomisation des algorithmes“, on constate une redistribution du rapport hardware-software:

  • “Par le bas“: des dispositifs miniaturisés prennent en charge des algorithmes minimalistes: cartes de crédit, badges, RFID… La dynamique des objets connectés relève du même principe.
  • “Par le haut“: des entités complexes tendent à s’ouvrir à une approche modulaire: de “l’Asus Transformer Book Trio“  voire la “Microsoft Surface“ au « projet ARA » de Google  ou les miniPC à monter soi-même.

À l’image de l’évolution des algorithmes, le monde du hardware semble voué à se décomposer, voire à s’atomiser.

Une logique s’installe qui devrait amener de plus en plus d’algorithmes devenus minimalistes à être pris en charge par des dispositifs matériels distincts… multiples… miniaturisés… et propriétaires.


Vers le carrefour des miniaturisations


Le propos a été développé dans un précédent billet (voir: la miniaturisation: l’essoufflement d’un argument de progrès). La problématique de la miniaturisation se lit selon deux axes:

  • Sa dimension sociale
  • Sa dimension technique

Selon le premier axe, la limite approche: celle du passage à l’invisible où les appareillages individuels deviennent obligatoirement des implants permanents (il est concrètement difficile de mettre et d’ôter des dispositifs qu’on ne voit pas).

Selon le second, elle semble sans limites, en route vers l’échelle nanométrique.

Freescale Semiconductor  

… vient de mettre au point le microcontrôleur ARM le plus compact au monde : 1,9 x 2 millimètres. Cette puce rassemble tous les éléments présents dans les circuits intégrés d’un ordinateur : processeur, mémoire, stockage et entrées/sorties.

Le nouvel Intel Curie   

Intel-Curie

Ce petit module qu’Intel espère voir dans des appareils aussi variés que des bracelets connectés, des robots ou des drones, est basé sur une puce Quark dont la principale particularité est de consommer très peu d’énergie. Intel Curie bénéficiera de 384 kB de mémoire flash, 80 kB de SRAM, supportera le Bluetooth Low Energy et comprend un accéléromètre à 6 axes et un capteur de mouvement.

Appuyée sur des procédés de ce type, l’échelle “finale“ des dispositifs électroniques personnels devrait devenir celle du “plus petit matériel susceptible d’être mis et enlevé facilement“, en un mot comme en cent: le bijou.

Le module d’Intel ci-dessus peut d’ores et déjà prendre place dans un objet de ce type, en attendant mieux.

A l’inverse, la miniaturisation d’un appareil de ce type pourrait en faire… une boucle d’oreille


 Un changement de paradigme


Une tendance et même une convergence de tendances ne valent que dans la mesure où elles ouvrent des champs nouveaux. C’est le cas ici.


Vers une scission des interfaces


Cette évolution vers des dispositifs miniaturisés implique, soit des interfaces utilisateurs vocales ou gestuelles, soit l’automatisme pur et simple, là où les interfaces visuelles ont régné jusqu’à présent. Le monde de l’image, marginalisé dans ce processus, se reconstruirait alors un univers spécifique autour de périphériques dédiés, d’appareils photo connectés, d’une évolution vers l’immersif… etc. Les transferts d’informations pourront compter sur les possibilités croissantes de transformations bi-directionnelles entre le parler et l’écrit (voir: Scénario post-rétrospectif: l’exemple du futur de l’écriture)


 Localisation et consommation d’énergie


Montres, bagues, boucles d’oreille, pendentifs, chainettes, piercings, les bijoux peuvent être localisés partout sur le corps et bénéficier des propriétés attachées à cette localisation: près de l’oreille pour écouter, de la bouche pour parler, au plus près des organes concernés pour la surveillance médicale…etc.

De par leur faible consommation, ces dispositifs miniaturisés reposeront la question de l’énergie de fonctionnement: sous un vêtement, l’énergie de la chaleur du corps, sur les parties exposées, celle de la lumière, au bout des bras ou des doigts, celle des mouvements (voir lien):

Il faut savoir que le rendement d’un muscle n’est que de 20 % …/… le reste est perdu en chaleur ! » L’idée de vouloir récupérer cette énergie résiduelle est donc loin d’être farfelue.


de l’informatique personnelle à l’informatique corporelle


Outre la fourniture d’énergie, le corps humain a d’autres ressources, notamment celle de mettre directement en réseau les objets avec lesquels il est en contact comme l’a montré l’expérience réalisée en public par Hans Vestberg, PDG d’Ericsson au CES 2012 à Las Vegas. Son corps a servi de conducteur dans le transfert d’une photo d’un smartphone vers un grand écran, sans le moindre câble ou signal radio. Cette technologie a été baptisée “capacitive coupling“

ericsson-invente-le-transfert-de-donnees-par-le-corps-humain

On retrouve ce principe à l’oeuvre dans la technologie Bodycom 

En éliminant la présence d’un émetteur et d’un récepteur sans fil, le Bodycom augmente l’autonomie des batteries et donc leur espérance de vie. Sa technologie exploite également les courants électriques qui sont transportés naturellement par le corps humain …/… Pour les chercheurs, le corps humain pourrait être un outil imbattable en terme de sécurité, impossible à pirater.


De la montre à la bague


La montre d’aujourd’hui vers… un même objet plus petit createur-de-bijoux-chevaliere-secret

On se pose aujourd’hui de multiples problèmes d’identification. Rappelons que le plus ancien procédé dédié à cette fonction est le sceau porté par… une bague BagueEgypte

la bague du général Eyptien Hooremheb, devenu roi d’Égypte en 1340 avant J.-C.

L’image d’en-tête de ce billet (même source) nous montre une bague de 1570 avec:

… sous le couvercle monté sur charnières, une boussole et un cadran solaire, le GPS et la montre du 15e siècle, mais en bague!!! Au-dessus, un sceau, avec les armes de la famille Von Steiger

Une bague de demain sera sans doute capable de beaucoup de choses. En fait, probablement de tout ce que sait faire aujourd’hui un bracelet connecté et même bien davantage comme:

  • Scanner, au passage, les empreintes digitales (authentification)

La bague en plastique brillant abrite des détecteurs de mouvement, un lecteur de tags NFC et un module Bluetooth Low Energy. Le tout est alimenté par une batterie qui offre, selon le constructeur, une autonomie de huit heures environ. Le prototype pèse moins de 10 grammes.

  • Filmer
  • Rétablir la confidentialité des conversations: parler à l’intérieur de sa main, écouter une main posée sur oreille
  • Mesurer beaucoup de choses sur le fonctionnement corporel
  • Localiser l’individu (on va sûrement y venir!)
  • Résoudre facilement les problèmes d’aujourd’hui (voir évolution des cartes VISA
  • Le tout en s’appuyant sur des dispositifs ne demandant pas à être rechargés (voir)
  • … et combien d’autres possibles, pour le meilleur ou le pire, comme avec les micro-radars de la société norvégienne Novelda, …

La fin d’une “ère technologique“


Tout cela ne serait qu’un pari sur l’avenir parmi d’autres si de possibles conséquences radicales n’y étaient pas attachées.

Une logique est en voie d’inversion. Nous en sommes déjà à des bijoux “intelligents“ dont le luxe réside… dans la « dissimulation » du caractère “technologique et connecté“ (voir la Smartwatch Urbane de LG)  … ou l’équivalent sur les bagues) ) … ce qui aurait paru impensable il y a encore très peu de temps.

La banalisation de l’électronique amènera vraisemblablement le design à être affaire de goût, de coût, de groupes sociaux… de mode. La montée en gamme s’appuyant sur les performances autant que sur les matériaux et le luxe de la présentation.

Enfin, à l’instar des micro-applications sur smartphone, une forme d’artisanat pourrait en émerger. Des produits décoratifs de petite taille incorporant des puces pourraient même donner une utilité “inespérée“ à ces imprimantes 3D personnelles dont personne ne sait quoi faire aujourd’hui. Mais là n’est pas le plus important.

L’important c’est que, la connexion devenant aussi naturelle que l’électricité, cette informatique personnelle ne va plus être suffisamment complexe pour enrichir les multinationales, actuels leaders du secteur.

Sans doute conscients du problème, les rats commencent à quitter le navire pour essayer de retrouver ailleurs la complexité perdue (véhicules autonomes, robots, informatique médicale, par exemple, pour Google et Apple).

Mieux.

L’atomisation des objets connectés pourrait signifier la mort prématurée d’une des icônes de notre représentation du futur: le robot… car celui-ci procède de la démarche… exactement inverse.

Nous allons y revenir dans les prochains billets.


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