présentation de la métaphore de l’été indien
“La chimie de l’été indien“ billet publié sur le site “science étonnante“ (et dont toutes les citations sont extraites) se propose d’identifier les mécanismes chimiques qui sous-tendent les automnes spectaculaires que connaissent les bois et les forêts du Canada et du nord des États-Unis et qui offrent une explosion de couleurs depuis les verts d’origine, jusqu’à une large déclinaison de jaunes et surtout de rouges.
En survol supersonique (nous allons y revenir), le vert est dû à la chlorophylle, le jaune au carotène, le rouge aux anthocyanes.
Ici, la question ne va pas être de savoir dans quelle mesure cela existe ou non chez nous, ni même de prendre parti sur les hypothèses scientifiques qui sont évoquées dans ce billet et dans ses commentaires. Seule la dimension métaphorique va nous intéresser. Pourquoi?
Parce que la pensée futurologique dominante tend toujours à associer les évolutions radicales à des “apports nouveaux“, fréquemment de type technologique, les fameuses “innovations de rupture“. Elle s’intéresse peu à la façon dont agit ou réagit le corps social récepteur. La métaphore de l’été indien nous présente un autre principe d’évolution radicale, mais là, ce sont surtout les conditions de la réception qui évoluent face à une influence extérieure faiblement variable.
L’automne: pourquoi le jaune?
Le texte susmentionné nous l’explique.
Pour la plupart des arbres, l’automne s’accompagne d’un jaunissement des feuilles. Il faut savoir que la chlorophylle est une molécule fragile que les plantes doivent continuellement renouveler. Pour que ce renouvellement ait lieu, l’arbre a besoin de chaleur et de lumière …/… Quand l’automne arrive, la chlorophylle n’est plus renouvelée et disparaît; c’est alors une autre molécule qui entre en jeu : le carotène. Le spectre des molécules de carotène montre que celles-ci n’absorbent que le violet et le bleu. En temps normal, elles n’influent pas beaucoup sur la couleur des feuilles puisque ces couleurs sont déjà absorbées par la chlorophylle. Mais quand cette dernière a disparu, c’est alors le carotène qui dicte la couleur des feuilles.
Ceci nous donne à voir un mécanisme très intéressant. Il n’y a pas d’apport nouveau, ce nouveau déterminant (le carotène) a toujours été présent et n’a pas vu sa puissance augmenter. Seul l’affaiblissement d’une autre force a permis son expression… pour un résultat pourtant spectaculaire: le changement de couleur d’une forêt.
L’affaiblissement d’une force peut donc jouer un rôle fondamental dans l’évolution. Cet aspect est fréquemment sous-estimé.
L’influence des conditions de la réception par le corps social nous renvoie entre autres à ce que nous avions envisagé autour du concept de légitimité (le concept de légitimité: une clé pour l’approche du futur)
L’été indien: pourquoi le rouge?
Retrouvons notre texte de référence.
En temps normal, il n’y a pas d’anthocyanes dans les feuilles des arbres. Pour être produites, ces molécules nécessitent en effet du sucre et du soleil …/… En temps normal, le sucre produit dans les feuilles est rapidement évacué vers le tronc de l’arbre. Mais quand arrive l’automne, l’arbre rompt les communications avec ses feuilles (au moyen d’une coque de liège qui se forme à la base de la tige), et du sucre se trouve piégé dans les feuilles. Si par ailleurs il fait beau, la combinaison du sucre et du soleil produit des anthocyanines, et les feuilles deviennent rouges !
Là encore, il n’y a pas d’apports extérieurs nouveaux. Nous retrouvons ici un phénomène de seuil déjà évoqué à propos du concept de percolation (la percolation: une base théorique pour analyser l’évolution). Ici, ce seuil correspond à l’arrêt d’un flux et implique une modification importante de l’écosystème récepteur.
en guise de conclusion provisoire
Il faut remarquer que les éléments en jeu dans les métamorphoses de l’été indien (la chlorophylle, le carotène, les anthocyanes… et le soleil) sont tous présents, depuis le début, et tout au long de la transformation. Ils interagissent. Le changement radical (ici les couleurs des paysages) ne découle pas de l’action d’une force de rupture particulière, mais d’une simple modification du poids relatif des forces existantes au sein du système.
Ce mécanisme ne peut pas ne pas exister dans l’évolution sociale.
nota
On se reportera à l’article source qui présente l’ensemble de façon très pédagogique et qui renvoie à des liens qui permettent un approfondissement.
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