l’effet Narcisse, l’extrême droite et le futur.

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la montée de l’extrême droite

 

Si un phénomène est d’actualité, c’est bien la montée de l’extrême droite en France comme dans plusieurs pays d’Europe. Inscrire ce phénomène dans une tendance suppose l’identifier autrement qu’au travers de sa dimension purement électorale et se poser la question:  Que cherche l’électeur qui vote pour l’extrême droite?

Pour cela, référons-nous aux sources par souci d’exactitude scientifique. On se souvient qu’un de ses slogans fut longtemps: «Le Pen dit tout haut ce que les gens pensent tout bas»… ce qui peut donner lieu à deux interprétations:

• La première, le Front national aurait des valeurs fortes et une majorité devrait normalement s’y rallier si le snobisme ou une inexplicable honte ne l’empêchait de le faire.

• La seconde, c’est le Front National qui ferait siennes les pensées montantes dans l’opinion… n’importe lesquelles, pourvu qu’elles soient rebelles (étant donné qu’il se situe dans l’opposition).

• Dans le premier cas, l’extrême droite aurait des valeurs

• Dans le second cas, elle n’aurait qu’un fonds de commerce

 Cette seconde hypothèse supposerait en l’occurrence une absence “totale“ de valeurs… caractéristique régressive fréquemment associée à la barbarie.

À l’appui de la première hypothèse, on trouvera l’argument que la pensée d’extrême droite existe et comporte historiquement un certain nombre d’invariants comme le racisme et l’antisémitisme. Or, cela ne prouve rien ou seulement qu’en période de crise, ces articles se vendent toujours très bien. Elle se présente comme anti-étrangère, c’est-à-dire “pour“ ceux qui votent et “anti“… ceux qui ne votent pas. Ce qui ne prouve toujours rien sur l’existence d’éventuelles valeurs. D’aucuns ajouteraient que le “nationalisme“ fait également partie de ces invariants. Certes, mais c’était cependant ces “nationalistes“ qui  collaboraient majoritairement avec l’occupant dans les années quarante, c’est-à-dire la dernière fois où le nationalisme aurait pu servir à quelque chose.

L’extrême droite à toujours eu le plus grand mal à exister dans les périodes de prospérité et nous revient toujours en période de crise. Qui a-t-il entre les deux chez le plus grand nombre ?

L’anxiété. La peur. L’extrême droite prend en charge toutes les peurs, quelles qu’elles soient. On se souvient que Jean-Marie Le Pen s’était même approprié le SIDA au moment où celui-ci commençait à faire peur. Il l’a abandonné quand cela n’a plus été le cas.

 

Si l’on opte pour le fonds de commerce, ce qui apparaît donc comme le choix le plus plausible, la montée de l’extrême droite pourrait être un produit de l’effet Narcisse.

L’effet Narcisse correspond au bien-être que procure l’identification de ses propres préjugés dans le discours de quelqu’un d’autre. (w)

 

comment naissent les préjugés ?

 

Les préjugés collectifs utilisables par l’effet Narcisse se construisent-ils de façon autonome et naturelle ? Peuvent-ils être influencés, voire fabriqués de toute pièce ?

La défiance à l’égard de l’étranger, l’installation d’une anxiété polymorphe en période de crise, les pulsions de violence comme conséquences de ces peurs mal identifiées, tout cela ferait l’objet d’une sorte de génération spontanée, présente même chez l’animal et par conséquent naturelle chez l’homme.

Cela signifierait que les effets de la Civilisation, fussent-ils issus d’un processus millénaire, n’auraient pas de prise profonde sur l’animal humain.

L’information n’aurait donc aucune part dans cette dérive? Mais à quoi servirait-elle si elle ne pesait en aucune façon sur nos préjugés?

Donc elle pèse…

… Dans un sens comme dans l’autre… Et si, pour des raisons commerciales, elle se met au service de la peur…

 

les préjugés sont-ils aisément modifiables ?

 

Les préjugés ont beaucoup été étudiés par les sciences cognitives et sont notamment associés à deux biais cognitifs (erreurs types de jugement) très importants:

• Le biais de confirmation d’hypothèses:

… décrit la tendance naturelle qu’ont les individus à privilégier les informations qui confirment leurs idées préconçues ou leurs hypothèses …/… et/ou à accorder moins de poids aux hypothèses jouant en défaveur de leurs conceptions. En conséquence, ces personnes rassemblent des éléments ou se rappellent les informations mémorisées, de manière sélective, et les interprètent d’une manière biaisée.

• le biais d’ancrage: décrit la difficulté à se départir d’une première impression. On le retrouve sous une autre forme au chapitre de la dissonance cognitive

La rectification d’idées acquises est plus pénible pour un individu que l’apprentissage d’idées nouvelles pour lesquelles il ne possède pas encore de modèle.

Tellement de difficultés pour changer ses préjugés contre tellement de plaisir (effet Narcisse) à les voir confirmés…

 

l’effet Narcisse, vecteur de communication du futur?

 

Les réseaux sociaux ou les requêtes Google apparaissent dès aujourd’hui comme des thermomètres en temps réels très efficaces de l’opinion. Il n’a jamais été aussi facile et aussi rapide de connaître les préjugés majoritaires et donc de savoir ce que les lecteurs-auditeurs-spectateurs… ont envie qu’on leur dise. Il n’a jamais été aussi facile d’exploiter l’effet Narcisse. Et cela va l’être de plus en plus, le Big Data aidant.

Cette révolution de l’information que l’on voit dans internet va donc constituer un levier extraordinaire à un principe connu depuis l’Antiquité… et qui va nous permettre de conclure, en révisant nos classiques, sur la définition que donne Wikipedia du mot “démagogie

La démagogie  (du grec demos « le peuple » et ago : « conduire ») est une notion politique et rhétorique désignant l’état politique dans lequel les dirigeants mènent le peuple en le manipulant pour s’attirer ses faveurs, notamment en utilisant un discours flatteur ou appelant aux passions. Le discours du démagogue sort du champ du rationnel pour s’adresser aux pulsions, aux frustrations du peuple. Il recourt en outre à la satisfaction immédiate des souhaits ou des attentes du public ciblé, sans recherche de l’intérêt général, mais dans le but de s’attirer la sympathie et de gagner le soutien. L’argumentation démagogique peut être simple afin de pouvoir être comprise et reprise par le public auquel elle est adressée. Elle fait fréquemment appel à la facilité, voire la paresse intellectuelle, en proposant des analyses et des solutions qui semblent évidentes.

… ce qui nous ramène à l’effet Narcisse… et à la montée de l’extrême droite.

 

 

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